La Chine établit un bilan officiel du nombre d'élèves morts dans le séisme du Sichuan
Près d'un an après le tremblement de terre, les autorités chinoises ont publié le chiffre de 5335 élèves morts ou disparus pendant la catastrophe. Un chiffre bien inférieur aux estimations précédentes.
Des recherches dans les décombres du collège de Dujiangyan après le séisme du 12 mai 2008
Le gouvernement chinois a révélé jeudi, pour la première fois, le nombre d'élèves morts ou disparus il y a près d'un an dans le séisme meurtrier au Sichuan (sud-ouest), un sujet très sensible en raison des plaintes des parents qui réclament la vérité. Le séisme du 12 mai 2008, d'une magnitude 8, le plus violent en 30 ans en Chine - près de 87.000 morts ou disparus au total -, a fait 5.335 morts ou disparus parmi les élèves, a annoncé Tu Wentao, responsable du département de l'Education du Sichuan lors d'une conférence de presse.
Savoir combien d'enfants ont connu un sort funeste est devenu la question la plus controversée de l'après-séisme. Jeudi, les autorités ont expliqué que le processus avait pris du temps, car il avait fallu recouper les données auprès de nombreuses administrations. "Ces nombres ont été obtenus à travers des méthodes légales. Il existe un large consensus sur ces nombres", a affirmé Tu Wentao, s'adressant aux journalistes dans le cadre d'un voyage de presse organisé par le gouvernement.
Des parents ont évoqué des cas possibles de corruption, soulignant que beaucoup d'établissements scolaires s'étaient effondrés comme des châteaux de cartes alors que d'autres bâtiments publics n'avaient pas bougé. Mais ceux qui réclamaient des comptes ont été intimidés par les autorités locales après avoir manifesté, alors que la propagande du régime préférait mettre l'accent sur l'unité de la patrie face à l'adversité.
Interpellé un mois après le séisme après avoir commencé à soutenir des parents d'enfants morts, un militant des droits de l'Homme, Huang Qi, a été arrêté et attend son procès pour "possession illégale de secrets d'Etat". Selon sa famille et les organisations des droits de l'Homme, son engagement en faveur des parents est à l'origine de son arrestation.
Les médias officiels avaient évoqué précédemment l'effondrement de 14.000 écoles durant le séisme, la moitié complètement détruites, et la mort de 9.000 élèves.
Jeudi, un responsable du département de la propagande du Sichuan a accusé certains journalistes occidentaux de jouer les fauteurs de trouble. "Quelques journalistes ne viennent pas dans la zone de la catastrophe pour enquêter, mais excitent les gens et leur demandent de s'organiser (contre le gouvernement)", a déclaré Hou Xiongfei, numéro deux du département de la propagande du Sichuan. "Nous ne voulons pas accueillir ce genre de personnes et nous gérerons cette situation conformément à la loi", a-t-il ajouté, sans donner plus de détails.
Un an après le séisme, la presse étrangère n'est plus la bienvenue dans les zones dévastées
Les commémorations du premier anniversaire du séisme du Sichuan approchent et avec elles arrivent les difficultés pour les journalistes. Les cas d'entraves, parfois violentes, à l'exercice de leur métier se sont multipliés ces dernières semaines
Les bienvenus une fois que ce sera bien reconstruitDans les zones dévastées, un système d'autorisations pour la presse étrangère a été mis en place à l'approche des commémorations. Dans chaque ville, un pass différent, valable une seule journée, est nécessaire. Une équipe de journalistes travaillant pour TF1 en a fait l'expérience. Arrivées à Chengdu, la capitale de la province du Sichuan, mercredi 6 mai, Charlotte Cailliez, Christèle Jaime et Lily Eclimont se sont entendues expliquer que tous les pass avaient déjà été distribués.Le lendemain dans la matinée, dans la ville de Dujiangyan, elles ont tenté d'aller filmer des familles devant le siège du gouvernement local. Mais devant les bâtiments officiels, des policiers en uniforme les ont arrêtées et emmenées au commissariat en leur disant que l'endroit était "sensible". "Ils voulaient savoir ce qu'on faisait là-bas. Ils nous ont gardées pendant plus d'une heure et demie", explique Charlotte Cailliez, "un policier nous a gentiment dit qu'une fois que ce serait bien reconstruit, nous serions vraiment les bienvenues. Un autre agent nous a expliqué que les familles n'arrivent pas à comprendre que c'est à cause du séisme et non à cause de la qualité des constructions que leurs enfants sont morts" dit-elle.Un peu plus tard dans la journée, alors qu'elles essayaient d'interroger des familles dans un village de préfabriqués, ces trois journalistes ont rapidement retrouvé des policiers. "Cette fois-ci, ils ne nous ont pas arrêtées mais ils ont demandé à deux agents de sécurité de nous suivre durant toute la visite. Evidemment, lorsque les gens voient quelqu'un en uniforme à côté de nous, ils ne racontent pas les mêmes choses" explique-t-elle.Des reportages désavantageux pour la "survie politique" des officielsLes fortes restrictions imposées à la presse étrangère contrastent avec l'accès relativement libre dont avaient bénéficié les médias au lendemain du séisme, comme l'écrit Qian Gang, sur le site du China Media Project, rattaché à l'Université de Hong Kong. "L'ouverture médiatique dans les premières phases des secours lors du séisme est quelque chose dont nous avons tous été témoins. Les contrôles se sont relâchés, y compris sur la question des écoles effondrées, dans les toutes premières phases, et l'on a vu des médias d'état tels que l'agence Chine Nouvelle et le Quotidien du Peuple en ligne s'engouffrer dans la brèche" écrit-il.Qian Gang, qui est l'ancien manager du Nanfang Zhoumo, l'un des magazines les plus indépendants du pays, voit plusieurs raisons à ce revirement des autorités. "En premier lieu, les reportages sur l'effondrement des écoles impliquaient de plus en plus d'officiels. Beaucoup d'officiels qui avaient travaillé dans les zones touchées sont maintenant arrivés à des postes plus élevés dans la hiérarchie. L'un des exemples les plus frappants est celui du Chef de la propagande de la province du Sichuan, l'homme dont la responsabilité était de contrôler les médias dans la région du séisme, qui avait servi auparavant comme Secrétaire du Parti de Dujiangyan" explique-t-il. "Il y a également d'autres officiels qui sont maintenant au centre du Parti à Pékin. Les reportages touchant aux négligences officielles étaient clairement désavantageux pour leur "survie politique". Et donc la mêlée de ceux qui font le pouvoir dans la vaste bureaucratie s'est rapidement unie dans une reconnaissance d'intérêts mutuels, et cette force a réussi à faire que le problème des écoles effondrées soit contourné, contre la détermination au centre [du Parti]" juge Qian Gang. Il estime également que ces effondrements d'écoles ont rapidement déclenché un mouvement populaire de défense des droits. Un mouvement que les autorités ne semblent pas vouloir montrer au grand public
dimanche 10 mai 2009
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire